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Le Sommeil

A quoi sert le sommeil?

 

Les recherches effectuées depuis cinquante ans ont confirmé le rôle du sommeil

comme élément réparateur et régulateur.

 

Pendant le sommeil, les défenses immunitaires se façonnent,

la peau se régénère, l'enfant grandit en sécrétant des hormones, etc.

 

À l'inverse, le manque chronique de sommeil accroît le risque d'obésité et d'hypertension.

Une bonne hygiène de sommeil est par ailleurs un facteur capital de prévention des maladies.

Revue des connaissances.

 

 

À quoi donc sert le sommeil ? Si l'on pose cette question, il est étonnant de constater la similarité des réponses, que l'on ait 7 ou 77 ans : se détendre, se reposer, rêver, être en forme. Les plus jeunes ajoutent : grandir ou éviter d'avoir des maladies.

 

Pour les croyances primitives, les rêves étaient envoyés à dessein au rêveur pour lui annoncer l'avenir.

 

Aristote pensait qu'ils pouvaient révéler au médecin les premiers signes d'un changement dans l'état du corps, imperceptibles pendant l'éveil.

Galien, médecin grec du IIe siècle après J.C., estimait que " le sommeil est utile aux humeurs qui doivent être élaborées…".

 

Le siècle des lumières a vu la diffusion de l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert où le sommeil est défini par " un état nécessaire à l'homme pour soutenir, réparer, et remonter sa machine ".

Buffon dans son Histoire naturelle écrit, en 1768, que " le sommeil n'est pas un état accidentel mais un état aussi naturel que la veille ".

 

En 1937, l'électroencéphalographie a permis de distinguer cinq états, allant de la veille au sommeil profond et, en 1957, deux chercheurs américains, Aserinsky et Kleitman, découvraient un sommeil particulier associé à des mouvements oculaires rapides, dénommé plus tard le sommeil paradoxal par Michel Jouvet.

 

Jusqu'à cette découverte, le sommeil était généralement considéré comme un état cérébral inactif.

 

La recherche nous a ensuite montré que nos nuits sont remplies d'une multitude d'événements dont nous ne sommes pas toujours conscients mais dont beaucoup reste à découvrir.

 

Nous pouvons cependant tenter d'élaborer une synthèse en nous référant aux informations provenant d'expériences de privations de sommeil, des recherches ou des théories portant sur le sommeil lent et le sommeil paradoxal.

Les effets de la privation de sommeil

 

Empêcher un rat de dormir pendant deux à trois semaines entraîne une perte de poids malgré l'augmentation de la prise alimentaire, une hypothermie et un décès par toxi-infections en relation avec la diminution des défenses immunitaires.

La privation partielle de sommeil paradoxal augmente la prise alimentaire et favorise une hypothermie.

 

Chez l'homme, le record détenu par l'Américain Randy Gardner, qui est resté éveillé durant deux cent soixante-quatre heures, a eu pour conséquences : une somnolence, la survenue de micro sommeils, une baisse des performances avec irritabilité, agressivité, désorganisation cognitive, des troubles visuels, intellectuels et une désorientation temporelle.

 

La réduction du temps de sommeil à quatre heures, pendant deux nuits, chez des hommes jeunes, déséquilibre la régulation de l'appétit et provoque une augmentation de la faim avec une appétence pour une nourriture riche en calories et en hydrates de carbone avec, comme résultats, une prise de poids et une majoration du risque de développer un diabète.

Ainsi, il y a une relation entre l'obésité et la dette de sommeil.

 

Très récemment, il a été démontré que le manque de sommeil était responsable d'une inflammation dans l'organisme et augmentait très nettement le risque d'hypertension artérielle.

 

Les navigateurs en solitaire rapportent la survenue d'hallucinations auditives ou visuelles lors de fortes privations de sommeil.

 


Le sommeil lent et la fatigue physique

 

L'économie d'énergie :

Pour les théories organiques, la " cause " du sommeil se situe à l'intérieur du corps avec des réparations de processus biochimiques et physiologiques, réparations qui sont ensuite d'ailleurs dégradées au cours de l'éveil.

 

Nous observons en effet un allongement de la durée du sommeil, notamment du sommeil lent profond, après un exercice physique intense, au cours de la grossesse, de la croissance et de la puberté.

 

Les théories protectrices, plus anciennes, soutiennent que le sommeil préserve l'organisme et le cerveau en facilitant le repos et la restauration des liaisons nerveuses, rendues moins efficaces par une longue période d'éveil.

 

Dormir participe à la protection contre le stress induit par la privation de sommeil et permet une économie d'énergie ainsi que le maintien de la température centrale.

 

En outre, le sommeil lent contribue à l'élimination des toxines et autres déchets des systèmes respiratoires, cardio-vasculaires et glandulaires.

 

 

 

Les sécrétions hormonales :

Pendant le sommeil lent, la synthèse protéique (c'est-à-dire les processus de fabrication des protéines) est accrue avec une augmentation de sécrétion de l'aldostérone, la testostérone, la prolactine et l'insuline.

 

L'enfant grandit pendant son sommeil en raison d'un pic de sécrétion de l'hormone de croissance lors des activités d'ondes lentes. Ainsi, les premières heures de la nuit sont-elles très importantes.

 

Un trouble qui entrave la production de sommeil lent peut perturber cette sécrétion; nous citerons, par exemple, la rupture de la courbe de croissance chez le jeune enfant ronfleur atteint d'un syndrome d'apnée du sommeil.

 

Les divisions cellulaires sont augmentées pendant le sommeil lent comme en témoigne le pic d'activité des lymphocytes sanguins en début de nuit.

 

Nos défenses immunitaires se façonnent la nuit et le manque de sommeil contribue à une sensibilité accrue aux infections.

 

 

 

L'adaptation à l'environnement :

Les théories comportementales ou éthologiques (comportement chez l'animal) lui confèrent un rôle dans l'adaptation.

En effet, pour survivre, un organisme vivant doit s'adapter et se préparer aux défis de l'éveil consécutif et aux variations prévisibles de l'environnement.

 

Des horloges circadiennes (fonctionnant sur un cycle voisin de vingt-quatre heures) endogènes sont là pour maintenir un état d'équilibre à l'intérieur du corps face aux modifications du milieu extérieur, on parle d'homéostasie (stabilisation des constantes physiologiques) prédictive.

 

Citons l'exemple de l'organisation temporelle de la peau humaine, qui favorise ses fonctions de renouvellement, de reconstruction et de réparation au cours de la nuit.

 

Le maximum des divisions cellulaires épidermiques se situe vers 1 heure du matin et le creux vers 13 heures.

Notre peau se prépare la nuit, elle anticipe les agressions lors de l'éveil. Ces variations circadiennes sont le fondement même de l'étude des rythmes biologiques (chronobiologie), basée sur le principe qu'il ne peut pas exister d'activité continue sans repos périodique.

 

 

 

Le sommeil paradoxal et les processus psychologiques

 

La restauration du système nerveux :

Ce rôle dans la maturation du cerveau explique que le sommeil paradoxal soit si prépondérant avant et après la naissance pour diminuer progressivement avec l'âge.

 

La proportion de sommeil paradoxal passe en effet de 50 % à la 36e semaine de vie fœtale à 20 % chez l'adulte.

 

 

 

Le rêve :

Le sommeil à mouvements oculaires rapides est lié à la vie psychique et à l'activité onirique, mais ces fonctions restent encore mystérieuses.

 

À partir du XIXème siècle, deux courants de pensée s'opposent : Pour Sigmund Freud, le monde invisible est à l'intérieur de nous-mêmes et l'inconscient détient la clé de nos songes, il est accessible par la psychologie et la psychanalyse.

 

Le discours scientifique, à l'opposé, plus matérialiste, refuse de se soumettre à l'invisibilité du monde qui gouverne le rêve avec des tentatives de l'expliquer par la neurobiologie et la neurophysiologie.

 

L'activité mentale ne s'arrête jamais, même pendant le sommeil, mais les rêves sont plus abondants au cours du sommeil paradoxal : Comme ce sommeil est prépondérant en fin de nuit, il est plus facile de se rappeler d'un rêve à ce moment-là.

 

 

 

La " personnalité " :

Michel Jouvet émet l'hypothèse que le sommeil paradoxal favorise la maturation de nos comportements innés.

En effet, notre potentiel génétique héréditaire nécessite d'être renforcé, chaque nuit, pendant le sommeil paradoxal, selon l'influence de l'environnement, afin d'adapter et de modeler notre personnalité.

 

 


Les autres fonctions du sommeil

 

La mémoire et l'apprentissage :

 

Ce domaine est sujet à controverses, le sommeil à ondes lentes (synonyme du sommeil lent) serait à la base du renforcement de la mémoire alors que le sommeil paradoxal accroîtrait les capacités de mémorisation.

Le but étant de maintenir les mémoires existantes et d'en créer de nouvelles.

 

Des expériences ont montré que la capacité de mémoire est meilleure quand il y a une période de sommeil après la phase d'apprentissage.

D'autres ont décrit l'augmentation du taux de sommeil paradoxal après un apprentissage.

 

 

 

La performance :

 

Qu'elle soit physique ou intellectuelle, la qualité de la performance est liée à celle du sommeil.

Les sportifs doivent bien dormir les nuits qui précèdent les compétitions, sous peine de résultats médiocres.

 

La sagesse est de recommander aux jeunes enfants ou aux étudiants de respecter un rythme veille-sommeil adéquat pour réussir la scolarité et les examens; la rentabilité au travail étant conditionnée par l'organisation de repos compensateurs, et ce quel que soit le domaine.

 

 

 

L'humeur, la bonne forme :

 

Les mauvais dormeurs sont volontiers agressifs et irritables.

 

Le manque de sommeil se manifeste de deux façons, soit par une dépression, soit par une hyperactivité et une agitation.

 

Un enfant dit " impossible " l'est bien souvent en raison d'un sommeil trop court ou de mauvaise qualité.

 

Un sommeil perturbé cause une grande variété de troubles, allant des vertiges, des crises de tétanie, de la " spasmophilie ", des douleurs aux maux de têtes.

 

Les infirmières scolaires voient souvent des enfants venir les consulter à 14 heures pour des malaises qui ne sont que le reflet d'un manque de sommeil.

 

Dans le monde du travail, une perturbation du sommeil et de ses rythmes favorise l'absentéisme.

 

 

 

La vigilance :

 

Rien ne peut remplacer le sommeil pour maintenir une vigilance correcte, et il est illusoire de vouloir être bien éveillé sans avoir un sommeil en quantité et en qualité suffisante.

 

Dormir conditionne nos capacités à rester éveillé, c'est-à-dire l'attention, les facultés d'adaptation et de réaction, ainsi que la disponibilité.

 

Fragmenter le sommeil allonge le temps de réaction, augmente les erreurs, favorise les troubles de l'attention et du jugement, avec - entre autres - une difficulté à prendre des décisions.

 

La somnolence qui en découle a des conséquences à court terme, souvent graves, en raison de la survenue d'endormissements inopinés à l'origine d'accidents domestiques, de la route ou à un poste de travail.

 

A titre d'exemple, le nombre d'erreurs est significativement plus élevé lorsque des chirurgiens sont privés de sommeil.

 

De nombreuses catastrophes industrielles peuvent être expliquées par la dette de sommeil.

 

L'explosion de la navette spatiale Challenger, en 1986, est l'exemple d'un accident dû à une erreur humaine et à une décision inadaptée liée au manque de sommeil. "… La privation de sommeil y a contribué, si elle n'en est pas la première cause, d'après un rapport d'investigations… Une commission présidentielle a conclu que les responsables au sol n'avaient dormi que deux heures la nuit d'avant et étaient en fonction depuis une heure du matin le jour du lancement… ".

 

 


Conclusion

 

Dans notre société moderne, nombreux sont ceux qui veulent concilier la vie professionnelle, la vie familiale, les loisirs et d'autres occupations, au détriment du sommeil.

 

Or, dans ce grand puzzle, il en est la pièce maîtresse en raison de fonctions spécifiques mettant en jeu des mécanismes physiologiques connus ou à découvrir.

 

Le repos est le complément indissociable de l'éveil, de la même façon que la nuit alterne avec le jour.

 

Penser que dormir est une perte de temps est une erreur : Une bonne hygiène du sommeil est par ailleurs un facteur capital de prévention des maladies.

 

 


 

Troubles du sommeil : un large éventail, de l'insomnie à l'hypersomnie


Le terme " troubles du sommeil " recouvre différentes pathologies et manifestations. La " classification internationale des troubles du sommeil " qui fait référence en la matière distingue :

 

  • l'insomnie : aiguë, mauvaise hygiène du sommeil, comportementale de l'enfant, due à une drogue ou autre substance…; l'insomnie est définie comme " correspondant à un mauvais sommeil nocturne caractérisé essentiellement par des difficultés d'endormissement, de maintien du sommeil ou une sensation de sommeil non réparateur ; ce sommeil de mauvaise qualité peut induire des perturbations diurnes telles que la baisse de vigilance, la diminution des performances, la fatigue ou l'irritabilité " (définition reprise dans le rapport Giordanella dans le chapitre " Troubles du sommeil ", rédigé par les médecins gériatres Fannie Onen et Hakki Onen)

 

  • les troubles du sommeil en relation avec la respiration : syndrome d'apnée du sommeil, qu'elle soit obstructive ou autre 

 

  • les hypersomnies : de tous types 

 

  • les troubles du rythme circadien du sommeil : syndrome de retard ou d'avance de phase, rythme veille/sommeil irrégulier, franchissement de fuseaux horaires (jet lag), travail posté, trouble en relation avec un trouble médical, dû à des drogues ou autres substances

 

  • la parasomnie : elle recouvre les éveils confusionnels, le somnambulisme, les terreurs nocturnes, les cauchemars, etc. 

 

  • autres catégories secondaires : les mouvements en relation avec le sommeil, les symptômes isolés (ronflement, somniloquie) et les autres troubles du sommeil.

 

Les troubles du sommeil ne doivent pas être confondus avec le déficit de sommeil, qui provoque la " somnolence diurne excessive ".

 

Selon le rapport Giordanella, cette somnolence, dans sa forme sévère, affecte 6 % de la population française.

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